Rencontres

Rendez-vous avec Philippe TORRETON

Sur le tournage du Téléfilm « Mélancolie ouvrière »,  pour la chaine Arte, j’ai fait une des + belles rencontre de mes aventures avec M. Philippe Torreton plus qu’un comédien, un grand homme. Philippe Torreton est originaire de Rouen, de Capitaine Conan en 1996 à Mélancolie ouvrière, ce sociétaire de la comédie française, est également un citoyen engagé.

Bonjour Philippe Torreton, comment etes vous arrivé sur ce projet « Mélancolie ouvrière » ? Tout simplement par Gérard Mordillat, le réalisateur et auteur du scénario. Qui m’a laissé un message sur mon répondeur en me disant qu’il avait un rôle pour moi, et qu’il aimerait bien me faire passer une histoire. Il m’a donc fait livrer le scénario, que j’ai lu et trouver super et j’ai donc dit Oui.

Vous connaissiez l’histoire de Lucie Baud ? Pas du tout, je n’avais jamais entendu parler d’elle avant ce film. D’ou la vertue aussi de ce film, de révéler des nom au dela des personnages célèbres de l’histoire, il y a des gens, des ouvriers, des ouvrières, des instits, des tas de gens, partout dans tous les domaines, dans tous les métiers, qui ont faient des choses formidables à un moment donné, une partie de l’histoire est passé par eux. Ils l’ont prise à bras le corps, cette femme a décidé dans un temps ou il était assez mal venu de se révolter contre les patrons, et encore plus quand on était une femme. Justement, de la faire, de se dresser et d’arrêter d’accepter l’inacceptable.
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A cette époque, c’était pas la double peine ? être une femme et les conditions de travail ? Oui, ça l’était aussi pour les enfants. Des enfants qui travaillaient plus de 10 heures par jours, sur les métiers à tisser. D’ou cette très belle scène d’ailleurs, dans le scénario quand Lucie Baud demande à Charles Odat, qui est mon personnage, qui était un syndicaliste qui a existé. Elle lui demande d’ou lui vient cette ferveur, cette ferveur syndicale qu’il a, auquel il a decidé de consacrer sa vie, et il parle de ce poème de Victor Hugo, mélancholia, dans les contemplations, qui parle de ces enfants qui vont au travail, et c’est un magnifique poème, je trouve cela assez beau de mélanger la poésie d’un poéte engagé qui était Hugo, comme quoi…
Finalement on retiens souvent les grands artistes qui sont engagés dans leur temps, et quand Hugo est mort il y avait toute une foule derrière lui.Il y a beaucoup d’acteurs quand ils vont mourir, ils n’en auront pas beaucoup…
C’est juste pour dire qu’un artiste, a une possibilité d’agir aussi, il doit être dans la société.

Pouvez vous nous préciser votre role dans ce téléfilm ? Oui c’est un syndicaliste, donc Charles Odat, qui a existé mais dont on ne sais rien de lui. Il est mentionné dans quelques archives. C’est un peu les débuts du syndicalisme, et ces gens là, comme Charles Odat était chargé de finalement sillonné la France, de conflit social en conflit social, pour aider les gens à faire grève. Car souvent il y avait des réactions spontanées, comme les filles ici dans le scènario. Pour leur dire qu’une grève c’est tactique, il faut tenir. Qui fait à manger quand on a pas de salaire, à la fin de la journée ? à la fin de la semaine ? on fait comment ?

Donc ce cotiser, créer des caisses, faire en sorte que ceux qui ont un travail ailleurs puissent éventuellement aider, faire des courses, aller sur des marchés du coin récupèrer de la marchandises, des légumes, de la viande, du pain, faire des soupes pour que les gens puissent manger.
Parce qu’il y avait les enfants, les familles étaient souvent nombreuses, c’est tactique une grève, savoir déchiffrer ce que dit le patron.
On en est encore là, souvent un syndicat sert à ça, peut-être même qu’à ça d’ailleurs. C’est dire mais qu’est ce qui se cache derrière ce que l’on nous a pondus..c’est quoi, est ce qu’il n’y a pas une entourloupe ?
Est ce qu’il n’y a pas en bas de page quelque chose que nous n’aurions pas lus ? que l’on auraient pas vus ?
Cela marche comme cela sur les contrats de téléphonie…alors….imaginez le reste.
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Comment joue t’on un personnage dont on a très peu d’infos, ou va t’on chercher les bases du rôles ? Dans le texte, dans le scénario. Si le scénario est bien écrit, il y a ce qu’il faut pour le jouer. On ne joue que ce qui est écrit, si c’est bien écrit, on a le sentiment d’un personnage, de quelqu’un qui a existé. Même si sont avant et son après n’est pas décrit, n’est pas filmé, mais l’on se doute de l’homme qu’il devait être. Pour moi jouer c’est dire d’abord, je dis donc je suis..
Evidément il faut bien le dire, mais si je le dit bien je le suis.
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Vous arrive t’il en jouant de changer des mots, des phrases ? Oui, cela arrive. Je n’en ai pas rencontré beaucoup mais il y a des réalisateurs, auteurs de leur scénario, qui vous font comprendre que ce qu’ils ont écrits c’est ce qu’il faut jouer…point, et il n’y a pas à discuter. Mais la plupart du temps, on sait très bien qu’un texte cela s’adapte, aux situations, il peut être transformé par exemple par le décor lui même, tout d’un coup une réplique qui paraissait importante, en théorie, en l’écrivant, et bien dans la réalité du décor, est inutile.
Parfois par une sous estimation et ce n’est pas forcément un défaut, mais du jeu de l’acteur aussi. Parfois une phrase peut être remplacée par un sourcil qui se lève, une attitude, un geste une invention de l’acteur au dernier moment, une façon de boire, des gestes peuvent raconter énormément. Tout d’un coup un geste peu rendre une phrase qui avait sa place, dans le scénario, à l’écrit, elle n’a plus sa place à l’image. Parce qu’elle est redondante.
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Si l’on prend un même texte jouer par 2 acteurs différents, on peut avoir 2 résultats différents ? Oui, c’est ce qui fait la singularité du métier, même s’ils jouent le même sentiment. même s’ils sont tout à fait en phase sur ce qu’il faut jouer, mais il y aura quelque chose de différent, et qui nous emmènera vers un ailleurs, un petit ailleurs ou un grand ailleurs mais c’est ce qui fait qu’au théâtre on continu à aller voir Tartuffe ou Hamlet, tous les rôles depuis des années et des années. C’est que l’on en fini pas de réinterroger non seulement ces textes, mais par quelqu’un de particulier.
On connait Tartuffe mais je ne connais pas Tartuffe joué par vous. Donc c’est pour ça que je viens vous voir, ce soir a 20h 30 (rires).
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Vous qui êtes un homme de gauche si je ne dis pas de bêtises, en jouant ce rôle de syndicaliste, avez vous changé votre façon de voir les choses ? Pas du tout, c’est quelque chose d’agréable d’être en conformité avec ses idées, avec un personnage que l’on joue. Mais est ce que c’est bien, je ne suis pas sur, parfois je me suis senti très confortable dans des rôles de « pourriture ». Ce qui compte c’est la moralité de l’oeuvre que l’on joue, moi je ne pourrai pas jouer un personnage bon ou gentil, peu importe, mais dans une oeuvre que je considererai immorale ou dont je n’assumerai pas la moralité. Ca non, ça je peu pas. En revanche jouer un salaud, quelqu’un de très loin, apparement de ce que je suis, moi je trouve cela assez passionnant. Pour moi la grande vertue de ce métier d’acteur, d’interprète, c’est que l’on se met à la place.
Et si tout le monde faisait cela sur la planète, je pense qu’il y aurait moins de conneries de dites et moins de violence, ce mettre à la place. Se dire qu’il y a une potentialité chez tout le monde de plein de choses. On n’est pas à l’abri, d’une part d’ombre, d’un sentiment dégueulasse, d’une attitude dégueulasse, alors on veut s’en protéger, on dit aux autres mais non Moi je pense pas être comme cela…C’est facile a dire, moi je n’en sais rien.
Donc tous les gens qui vous donnent des leçons de comportement, de ce qu’ils auraient été ou de ce qu’ils auraient fallut faire, moi je les attends au pied du mur… c’est la que l’on voit le maçon comme on disait chez moi.
Parce que c’est pas évident, que les vies sont étranges, parce que l’on ne sait pas. (l’intégrale sur Loire FM 100.9)
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Comment choississez vous vos rôles ? Il y a plein de choses qui rentrent en jeu, le sentiment de connivence, de complicité, la même façon de regarder notre monde à nous. De films, de pièces, de livres, la façon d’interroger la société cela compte. Est ce que c’est un bon scénario, est ce que c’est intéressant à jouer ? avec qui et pleins de choses, par exemple j’étais très content de rencontrer Virginie Ledoyen, c’est une fille que j’aime beaucoup et on n’avais pas eu l’occasion avant, nous n’avons pas été dans les mêmes films, et la c’est la première fois. C’est ce que j’aime bien chez Gérard Mordillat, c’est cette vision des gens qu’il a, pourtant c’est quelqu’un qui retravaille beaucoup avec les mêmes personnes, il constitue un noyau dur, c’est une famille comme on souhaiterais que soit la France, qui accueil des gens. J’en suis la preuve…

 

Pour nous spectateurs, nous avons aucune vision de votre métier, mais en therme de scénario, vous en recevez combien par jour, par mois ? En ce moment c’est pas mal, je ne sais pas pourquoi, il y a une reprise c’est le printemps cela doit pousser. Moi cela fait très longtemps que je n’ai pas tourné, je vais d’ailleurs mettre entre parenthèse le théâtre*, après je ne fait plus de théatre pendant quelques temps.

Je voudrais tourner mais d’abord rester chez moi un peu plus longtemps, une pièce de théatre c’est formidable mais cela vous met sur les chemins toute l’année, donc moi je commence à être un papa du dimanche un peu, et j’aimerai bien être un papa de la semaine.
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Nous sommes stéphanois, avez vous une image de Saint-Etienne ? Oui très récente parce que j’y est joué « Arturo Ui » il n’y a pas très longtemps, j’avais joué précedement sur la scène lyrique de l’opéra, qui est pas terrible pour le théâtre je trouve, et récemment au théatre de la comédie dirigé par Arnaud Meunier, un garçon vraiment formidable, parce qu’il y a un nouveau théâtre qui va se construire.
Je trouve cela bien qu’une ville qui traverse de grandes difficultés financières, je crois qu’elle a pas mal morflée avec la crise des subprimes et les emprunts pourris. D’oser la culture et de continuer à promouvoir cela. C’est aussi la ville de Jean Dasté, Jean Dasté figurez vous que quand j’avais 17 – 18 ans on avait fabriqués un petit théâtre, dans la banlieue de Rouen, et Jean Dasté était venu inaugurer notre petit théâtre, donc nous avions fait une petite plaque, avec un petit rideau que nous avions ouvert, le théâtre a été inauguré par Jean Dasté.
A l’époque je ne connaissait pas ce monsieur, du haut de mes 17 ans, depuis j’ai appris à le connaitre et j’en suis très content.
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Pour revenir à Mélancolie ouvriere, trouvez vous un parallèle entre cette histoire début 1900 et aujourd’hui ? Totalement, il n’y a que des correspondances, les choses changent sur des détails, mais l’exploitation est la, elle est toujours possiblement la, le langage patronnal est toujours aussi ambigue, peut-etre toujours aussi violent. Dans cette campagne (présidentielle) on parle beaucoup de l’emploi et pas du travail, et le travail est destructeur en ce moment, destructeur de la cellule familiale, des êtres humains, il n’y a jamais eu autant de gens en dépression. Oui on ne fait plus travailler les enfants sur les métiers à tisser, mais c’est autre chose, des gens préssurisés a tous les niveaux, interrogez les caissières d’hyper-marchés vous allez voir ce que vous allez entendre sur les pauses pipi, la surveillance permanente, comment on glisse un petit paquet de chewing gum dans le sac a main pour se débarasser d’une personne…
Même la caricature est toujours présente, c’est plus les mêmes, aujourd’hui les enfants qui travaillent ne sont plus français, ils sont indiens, africains, ils sont très loin, donc rien n’a changé, ce n’est pas parce que cela ne se passe plus chez nous que nous avons évolués. Si cela se passe ailleurs il est ou le progrès ? nous avons juste poussés la misère ailleurs, l’exploitation, la barbarie du travail…
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Pourtant aujourd’hui le message c’est : il n’y a plus de droite, plus de gauche ?? Il y a une idéologie derriere ce discours, il peut y avoir une sincerité parfois, mais le plus souvent c’est une idéologie, un confort, une paresse intellectuelle, pour revenir a notre conversation en OFF, moi je dis non, pas tous pourris, on peut dire plein de choses de Benoit Hamon, de Mélenchon, de Poutou, mais ce ne sont pas des pourris je suis désolé. Et je pense que Macron n’est pas un pourri, alors il a des idées que je n’aiment pas, mais je pense pas que l’on est le droit de dire que c’est un pourri. Je ne dirais pas cela de certains…
Il y a des tas de gens honnêtes, il se trouve que notre système a des carences, et des carences très graves qu’il va falloir d’urgence remobilisées.

Mais moi il y a un truc qui m’effare dans cette camapgne, c’est le peu de place que l’on accorde a l’urgence judiciaire, si l’on veut que ce pays alle mieux, il faut absolument rendre la justice compétente, peut-être doubler le budget de la justice, engager du personnel, recruter des juges, construire des tribunaux…(l’intégrale sur Loire Fm 100.9)

Philippe Torreton, merci beaucoup, on vous donne rendez-vous à Saint-Etienne ?

 

Oui peut-être, c’est une place culturelle. Moi c’est ce que je dis aux municipalités que hésitent à investir, quand on se dote d’un outil théâtrale digne de ce nom, la ville s’inscrit sur les schèmas de tournées et donc raisonne dans la tête des gens, on sait que Saint-Etienne a un nouveau théâtre, BING, plus grosse scène, plus grosse capacité d’accueil, plus de moyens, donc plus de spectacles qui vont marquer l’histoire et l’émotion des gens.

On met la ville sur une étagère qu’elle ne pouvait pas atteindre avant à cause de capacités d’accueil, ou d’un manque technique. Donc les villes sont dans des listings, ou l’on peut tourner, et donc un rayonnement. Donc OUI Saint-Etienne, Bien sur.

 

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